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Glossaire

Notre organisme dispose de mécanismes qui sont activés au niveau cellulaire et moléculaire pour s’opposer à l’initiation et au développement d’un cancer. Cependant, ces mécanismes sont parfois détournés par les cellules cancéreuses.

La surveillance des tissus par le système immunitaire

Les cellules de notre organisme sont contrôlées en permanence par le système immunitaire.

Un peu comme pourvu de têtes chercheuses, le système immunitaire est chargé de surveiller si notre organisme est infecté par un agresseur (agent pathogène) ou envahis par des cellules anormales comme au cours d’un cancer. C’est le système de défense de notre corps qui agit / nous défend contre les maladies, les poisons, les agents pathogènes comme les virus, les bactéries, les parasites.

Cette surveillance s’effectue grâce à la présence de fragments de  molécules sur la surface des cellules : ces fragments sont appelés des antigènes.

Une cellule saine présente à sa surface des antigènes qui sont reconnus comme appartenant à notre organisme : le soi. Cette reconnaissance peut être effectuée par les lymphocytes effecteurs du système immunitaire grâce à un récepteur à leur surface.

Une cellule cancéreuse présente à sa surface des antigènes modifiés. Ces antigènes du non-soi sont reconnus par les lymphocytes effecteurs comme étrangers à notre organisme. Ils sont alors activés contre les cellules cancéreuses et les éliminent.

Les mécanismes d’échappement de la réponse immunitaire

Les cellules cancéreuses parviennent à échapper à la surveillance du système immunitaire de différentes façons :

  • Les cellules cancéreuses peuvent ne plus présenter d’antigènes à leur surface. Elless deviennent alors « invisibles » et ne peuvent plus être éliminées par le système immunitaire.
  • Certaines cellules cancéreuses peuvent être peu immunogènes, c'est-à-dire qu’elles ont une faible capacité à activer le système immunitaire. Elles présentent peu ou pas d’antigènes du non-soi à leur surface et présentent surtout des antigènes du soi. Par conséquent, ces cellules ont une forte capacité à échapper à la surveillance du système immunitaire et peuvent se développer et circuler plus facilement.
  • Les cellules cancéreuses peuvent aussi échapper à la surveillance du système immunitaire en empêchant sa mobilisation contre la tumeur. Dans ce cas, la tumeur génère un microenvironnement immunosuppresseur qui empêche son infiltration par les cellules du système immunitaire.
  • La tumeur peut également favoriser le recrutement de cellules du système immunitaire qui inhibent la réponse immunitaire antitumorale comme les macrophages et les lymphocytes régulateurs.

Voir également :

L'échappement tumoral, interview du Pr Alain Puisieux

L'embryogenèse est le processus de formation d'un organisme pluricellulaire, végétal ou animal, de la cellule œuf issue de la rencontre des gamètes parentaux à un être vivant autonome.

Issu d'une cellule unique, l'embryon se développe par division cellulaire. Chez l'animal, l'embryogenèse désigne la transformation de l'oeuf en embryon. Les premiers stades du développement embryonnaire se nomment morula (8-16 cellules), blastula, gastrula, neurula. Chez l'homme, on parle de fœtus à partir du troisième mois.

Expression créée au XIXe siècle, redéfinie par Conrad Waddington en 1942 dans son sens actuel, l’épigénétique désigne l’étude des influences de l’environnement cellulaire ou physiologique sur l’expression de nos gènes.

 

En savoir plus

Le pouvoir des gènes remis en question

Au début des années 1990, la communauté scientifique internationale s’est lancée dans un projet ambitieux dont l’objectif était de séquencer complètement le génome humain (…voir article). Il aura fallu 14 années pour réaliser cette cartographie.

Au vu des résultats, –  seulement 10% du génome code pour des protéines –  l’étendue du pouvoir de nos gènes a été relativisée : ce n’était pas qu’en regardant le génome qu’on allait pouvoir expliquer l’apparition de telle ou telle maladie. Ce n’était pas une totale surprise pour les biologistes du développement, puisque nous savons qu’à partir d’une cellule, un œuf fécondé détenteur d’un génome particulier,  on aboutit au développement d’un organisme multicellulaire complexe et complet. D’une division à l’autre, l’ADN ne change pas mais les cellules acquièrent pourtant des fonctions spécifiques (voir article sur les cellules souches). Chaque type de cellule exprime différents gènes à des moments précis. Différents facteurs, différentes protéines sont produites par certaines cellules mais pas par d’autres ou à des moments précis et certains gènes codant « s’éteignent » à d’autres moments.

Aussi, une autre dimension que les gènes peut apporter des réponses – ou en tout cas des débuts de réponses – à l’expression différentiée des gènes dans le temps et dans l’espace. Des changements au niveau de l’ADN (méthylation de l’ADN ou d'acétylation des histones) conduit le génome à être lus différemment d’une cellule à l’autre et que ces lectures peuvent être propagées de manière stable.

Conrad Hal Waddington, scientifique et philosophe britannique né en 1905, avait observé que des chocs thermiques induisaient chez la mouche de multiples malformations que l’on retrouvait dans la descendance. À l’époque, Waddington suppose que ces chocs illustrent des mutations cachées, héritées sous leur nouvelle forme. Il est le premier à formuler de façon explicite la nécessité d’établir les liens de causalité entre génotype et phénotype pour appréhender les processus du développement. Il rapproche ainsi la génétique – la science de l’hérédité –, de l’épigénèse – la théorie du développement par élaboration progressive des formes.

L’épigénétique se définit aujourd’hui par l’étude des changements modifiant l’expression des gènes sans mutation de l’ADN. Des changements héritables et réversibles, qui se transmettent en dehors des gènes. L’épigénétique se situe à l’intersection des différentes disciplines que sont la génétique, la biologie du développement, l’écologie et l’évolution.

 

La génétique, des questions laissées sans réponse : les réponses de l’épigénétique

Comment, pourquoi, quand ?

  • Comment nos cellules, issues de la division d’une unique cellule et dotées du même patrimoine génétique, peuvent-elles être aussi différentes selon qu’elles constituent les yeux, un muscle, la peau ou le cerveau ? Entre les gènes et les caractères qu’ils codent, il faut supposer un niveau de régulation supérieur…
  • En 1999, la généticienne Emma Whitelaw, de l’université de Sydney (Australie), montre pour la première fois qu’une modification épigénétique peut être transmise à la descendance. Elle identifie des souris génétiquement identiques mais dont le pelage varie. Les souris à fourrure brune sont normales, les souris à fourrure jaune sont sujettes au cancer, sont diabétiques et obèses. Cette diversité tient à la variabilité épigénétique d’un gène. En 2003, Randy Jirtle, biologiste américain né en 1947 connu pour ses recherches pionnières en épigénétique, montre qu’en nourrissant ces souris gestantes d’aliments riches en donneurs de méthyles, le nombre d’individus jaunes obèses baisse parmi les petits. Il est donc possible de modifier les marques épigénétiques.
  • Chaque gène est présent en deux exemplaires (allèles), l’un transmis par la mère, l’autre par le père lors de la fécondation. Le plus souvent, ils s’expriment ensemble indifféremment, mais parfois un seul allèle s’exprime, l’autre, inactivé, restant « muet ». Le caractère exprimé pourra alors varier car l’allèle maternel et l’allèle paternel peuvent porter des marques épigénétiques différentes.
  • Les marques épigénétiques jouent peut-être aussi un rôle sur le plan psychique. Des chercheurs canadiens ont montré en 2004 que des ratons élevés par des mères attentives étaient, adultes, plus résistants au stress que des ratons peu maternés.
  • L’énigme des vrais jumeaux : « Vous semblez pourtant si différents ! »
    Malgré un patrimoine génétique identique,  les vrais jumeaux peuvent présenter des différences physiques, telles qu’un visage plus rond, des grains de beauté différents... L’un peut développer telle ou telle pathologie et l’autre pas. Comment expliquer alors ces différences ? Certains gènes pourraient être actifs seulement chez l’un des deux jumeaux. On observe également que ces différences s’accentuent avec l’âge et que les vrais jumeaux se différentient au cours de la vie d’autant plus qu’ils adoptent des modes de vie différents. S’ils sont identiques génétiquement, ils ne le sont pas « épigénétiquement ».

 

Du plan moléculaire au plan écologique, un environnement à fort impact

En 2005, les chercheurs Marcus E Pembrey et Lars Olov Bygren (généticiens cliniques à l'Institut de santé infantile à Londres) ont montré que les habitudes alimentaires des grands-parents pouvaient avoir des conséquences sur... leurs petits-enfants.

L’environnement des gènes est formé:

  • dans le milieu intérieur, par :
    • les 65-70 % d’ADN dont la fonction est encore largement inconnue,
    • les protéines formant les chromosomes,
    • la cellule (son noyau, son cytoplasme, ses organites),
    • le tissu, l’organe de localisation de la cellule,
    • l’individu lui-même ;
  • dans le milieu extérieur, par :
    • notre alimentation,
    • nos activités,
    • le stress,
    • notre lieu de vie,
    • notre exposition environnementale ou professionnelle (agents physiques, chimiques et biologiques)...

Si notre cadre de vie et nos conditions d’existence ont une influence sur notre santé, mentale et physique, ils peuvent également modifier le fonctionnement et l’expression de nos gènes hérités de nos parents à la naissance.

 

Le code génétique orchestré comme une partition de musique par l’épigénétique

L’épigénétique concerne l’influence de l’environnement cellulaire ou physiologique et de l'histoire individuelle sur l’expression de nos gènes.

L'épigénétique s’intéresse à l'ensemble des modifications de l'expression génique transmissibles d'une génération à l'autre, sans altération des séquences nucléotidiques, et avec un caractère réversible.

Cette discipline cherche à expliquer comment des modifications qui ne sont pas codées par la séquence d'ADN (méthylations, prions...) peuvent réguler l'activité des gènes en facilitant ou en empêchant leur expression. En effet, la séquence des nucléotides (ADN) qui composent certains gènes n’est pas modifiée. En revanche, les protéines codées par ces gènes peuvent être produites à des moments ou à des endroits différents selon les marques épigénétiques qui sont présentes ou non sur les gènes. On dit que ces marques résultent de l’environnement d’un gène.

C’est un peu comme une partition de musique coordonnée par un chef d’orchestre qui donne une couleur spécifique et un tempo particulier à l’interprétation, probablement différentes de celles qu’avait imaginées l’auteur. Comme l’épigénétique, le chef d’orchestre rend cohérent le jeu de l'ensemble des musiciens/gènes, il règle l'équilibre des diverses masses sonores de l'orchestre/organisme.

 

Des gènes contrôlés par une série d’interrupteurs : même en musique, les silences modulent l’interprétation orchestrale

Notre environnement, du plan moléculaire au plan écologique, est susceptible de modifier l’expression de nos gènes qui sont en quelque sorte gérés et contrôlés par une série d'interrupteurs.

Des réactions enzymatiques peuvent rendre un gène "muet", c’est-à-dire empêcher son expression. Même en musique, les silences modulent l’interprétation orchestrale et ne doivent pas être sous-estimés.

Au fur et à mesure que les cellules se développent, leur destinée est régie par l’utilisation sélective et la mise sous silence de gènes. Ce processus dépend de facteurs épigénétiques.

Les profils de méthylation de l’ADN ou d'acétylation des histones semblent jouer un rôle dans toutes sortes de phénomènes où les gènes sont activés et désactivés.

L’épigénétique joue un rôle dans:

  • l’adaptation des êtres vivants aux conditions environnementales ;
  • les différences physiques, de comportements ou de développement de maladies chez des vrais jumeaux ;
  • le processus de différenciation cellulaire qui permet qu'une cellule unique va produire les 200 familles cellulaires qui forment notre corps. On peut rappeler aussi qu'une chenille et son papillon ont exactement les mêmes gènes ;

 On peut sans doute comparer la distinction entre la génétique et l’épigénétique à la différence entre l’écriture d’un livre et sa lecture. Une fois que le livre est écrit, le texte (les gènes ou l’information stockée sous forme d’ADN) seront les mêmes dans tous les exemplaires distribués au public. Cependant, chaque lecteur d’un livre donné aura une interprétation légèrement différente de l’histoire, qui suscitera en lui des émotions et des projections personnelles au fil des chapitres. D’une manière très comparable, l’épigénétique permettrait plusieurs lectures d’une matrice fixe (le livre ou le code génétique), donnant lieu à diverses interprétations, selon les conditions dans lesquelles on interroge cette matrice.

Thomas Jenuwein (Institut Max Planck d'immunobiologie et épigénétique – Fribourg – Allemagne,)

 

L’épigénétique, un enjeu médical et scientifique

Pour le cancérologue Zdenko Herceg, du Centre international de recherche sur le cancer (IARC – Lyon), « des changements épigénétiques et des mutations génétiques sont présentes dans tous les types de cancers, mais leurs interactions sont si complexes qu’il est difficile de connaître les évènements initiaux ».

On sait aujourd’hui que des processus chimiques très divers jouent un rôle dans le développement de nombreuses maladies, dont le cancer. Ces processus interviennent aussi dans le comportement, le vieillissement ou la longévité des individus. Autant dire que l’épigénétique, domaine de recherche en pleine expansion depuis quelques années, est un des enjeux scientifiques et médicaux majeur de notre époque.

Jean Pascal Capp, docteur en cancérologie moléculaire, maître de conférences à l’Institut national des sciences appliquées (INSA) de Toulouse, écrit ainsi dans « Le cancer sous l’emprise du milieu » : « Les changements épigénétiques ne touchent pas les séquences des gènes elles-mêmes, mais leur expression, par le jeu de modifications chimiques et structurales de la chromatine, le filament ressemblant à un collier de perles formé par la molécule d’ADN et les protéines qui lui sont liées. Par exemple, des gènes suppresseurs de tumeurs ou impliqués dans la réparation de l’ADN sont ainsi inhibés. La cellule a alors encore moins de latitude pour contrôler ses divisions ou empêcher les mutations. Dans d’autres cas, ces modifications réactiveraient des gènes inactifs, ce qui contribuerait à la prolifération des cellules dans la tumeur. L’instabilité épigénétique serait aussi importante dans la cancérogenèse que l’instabilité épigénétique. Toutefois, les changements épigénétiques sont transitoires et soumis à des variations aléatoires rapides. Cela contribue à ce que les cellules tumorales présentent des caractéristiques variables au sein d’une même tumeur ».

Epithélium : tissu de revêtement de toutes les surfaces internes et externes du corps. Il est constitué de cellules, dites cellules épithéliales, de forme et de disposition variable.

L’épithélium est un tissu qui recouvre toutes les surfaces de notre organisme, vers l'extérieur (peau, muqueuses des orifices naturels) ou vers l'intérieur (cavités du cœur, du tube digestif, etc.). Il peut également constituer des glandes.


Un épithélium est formé de cellules serrées les unes contre les autres dites cellules épithéliales.

Le nombre de celles-ci, leur forme et leur disposition varient selon le type d'épithélium.

Les cellules épithéliales ont des fonctions qui diffèrent selon l’organe : protection par rapport à l’environnement extérieur (ex : peau), réception sensorielle (ex : peau), protection mécanique (ex: épithélium œsophagien), épithélium sécrétoire de protection chimique (ex: épithélium gastrique), d’absorption (ex: épithélium intestinal), de mouvement (ex: épithélium respiratoire et épithélium des trompes utérines), d’échanges de substances (ex: épithélium des capillaires *)…

(*petits vaisseaux sanguins)

Un processus biologique extracellulaire se produit en-dehors de la cellule, par opposition à intracellulaire (dans la cellule).